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Des abus et violations du droit humain à l’alimentation et à la nutrition dans les plantations de thé

Une Mission internationale indépendante d’établissement des faits, dirigée par le Réseau mondial pour le droit à l’alimentation et à la nutrition (GNRtFN), s’est rendue sur des plantations de thé en Assam ainsi qu’au Bengale occidental du 27 novembre 2015 au 4 décembre 2015.

La Mission avait pour objectif d’enquêter sur le statut du droit humain à l’alimentation et à la nutrition et des droits connexes des personnes travaillant sur les plantations de thé, ainsi que sur le rôle que jouent les dirigeants des exploitations de thé, les entreprises et les organismes gouvernementaux.

Lors de conférences de presse à Kolkata et à Delhi, la Mission a déclaré avoir relevé un grand nombre d’abus et de violations de droits des personnes travaillant sur les plantations de thé en Assam et au Bengale occidental. L’équipe a constaté que les salaires y sont extrêmement bas, les conditions de travail précaires et les logements et les équipements sanitaires inadaptés, mais également que les femmes sont victimes de violences structurelles et que l’accès à l’eau, à l’éducation et aux soins médicaux fait défaut ; Ceci constitue un ensemble de facteurs dangereux pour les populations des plantations. Le droit syndical des personnes travaillant dans les plantations de thé étant entravé, cette situation inacceptable contraint des milliers de familles à fuir la faim, la malnutrition et le désespoir, comme en témoignent de plus en plus les quotas relatifs au travail des enfants et aux migrations forcées.

Les personnes travaillant sur les plantations de thé et leurs familles continuent à être confrontées à des pénuries alimentaires et reçoivent un salaire bien inférieur au minimum qui leur permettrait de vivre décemment dans les plantations. Représentant actuellement environ 122,50 Rs par jour, les salaires sont inférieurs aux dépenses minimales des familles des travailleuses et des travailleurs, ce qui n’est pas conforme à l’application de standards minimums. Ceci a une incidence, en particulier sur les femmes, qui représentent près de 70 % de l’ensemble de la force ouvrière dans les plantations. Elles sont victimes de discrimination structurelle, d’exclusion et d’exploitation, et l’on attend malgré tout d’elles, qu’elles s’occupent de leurs enfants et de leurs familles. Les violations de leurs droits en matière de procréation finissent par avoir des répercussions sur l’environnement nutritionnel de leurs bébés, ce qui a des conséquences graves sur le développement physique et cognitif et provoque un cercle vicieux de malnutrition transmise de générations en générations.

On estime qu’une personne travaillant sur ces plantations, reçoit moins d’un pour cent du prix moyen que paie le consommateur international ou indien par kilo de thé. C’est une situation dramatique, surtout compte tenu du fait que les travailleuses et les travailleurs s’épuisent dans les plantations de thé, dans des conditions de travail déplorables et sont confrontés à l’inertie des dirigeants des plantations. Cette situation extrême est encore aggravée par le contrôle qu’exercent ces derniers sur les travailleurs, hommes et femmes, et leurs familles ; contrôle qui se traduit finalement par une perte d’autonomie et d’autodétermination.

Plusieurs cas de fermetures de plantations non-déclarées et illégales ont été recensés, ce qui inquiète les travailleuses, les travailleurs et leurs syndicats, qui constatent qu’il est très difficile de lutter contre des conditions de travail déplorables. Les entreprises ignorent le droit et les lois nationales en vigueur qui règlementent les relations employeurs/employés dans les plantations ; le gouvernement central et les gouvernements des États, quant à eux, demeurent inactifs lorsqu’il s’agit de faire appliquer ces lois.

Lors de la Mission, l’équipe a écouté les revendications de première importance des personnes travaillant sur les plantations, qui concernent notamment le versement d’un salaire minimum vital et l’amélioration des conditions de travail, en particulier pour les femmes enceintes qui doivent rester actives jusqu’au huitième mois de grossesse et dont les besoins spécifiques d’après la naissance sont négligés, y compris en ce qui concerne l’allaitement. Il est urgent de remettre en état les logements existants et l’approvisionnement en eau potable dans les locaux à usage d’habitation et sur les lieux de travail, tout en améliorant l’accès à l’éducation pour les enfants et le système de soins dans les plantations de thé.

La fermeture des plantations ayant des conséquences préjudiciables sur la vie de milliers de personnes, les travailleuses et les travailleurs demandent également l’octroi d’une aide immédiate aux populations touchées. L’accès à la terre fait également partie des revendications principales des travailleuses et des travailleurs qui n’ont aucune perspective d’accès à la propriété et à l’autonomie. De plus, les communautés vivant de l’exploitation du thé demandent à participer pleinement à la prise de décisions lors de processus politiques qui concernent leurs propres vies.

Dans ses recommandations préliminaires, le GNRtFN exhorte le Gouvernement indien à prendre des mesures en urgence, afin de garantir la réalisation de l’ensemble des droits humains des personnes travaillant dans les plantations de thé, en particulier en ce qui concerne le droit à l’alimentation et à la nutrition, et de s’assurer que les décisions liées à l’avenir des plantations de thé – y compris toute solution structurelle envisagée pour remédier à la situation actuelle – soient prises en impliquant les travailleuses et les travailleurs concernés tout au long du processus. Le Gouvernement doit également s’assurer que le droit syndical n’est en aucun cas violé et il doit protéger les travailleuses, les travailleurs et les représentants syndicaux de toute intimidation ou coercition exercée par les dirigeants. Les entreprises doivent être tenues responsables de la non?application du Plantations Labour Act.

Le GNRtFN rappelle également que le National Food Security Act (2013) doit être pleinement mis en œuvre et que l’Inde a l’obligation de garantir le droit humain à une alimentation adéquate et à la nutrition ainsi que la réalisation des droits afférents pour les populations des plantations, conformément au droit national et international.

 

NOTES À l’ATTENTION DES ÉDITEURS

  • Le Réseau (GNRtFN) est une initiative lancée par des organisations de la société civile et des mouvements sociaux (incluant des paysannes et paysans, des personnes vivant de la pêche et du pastoralisme, des sans terre, des consommatrices et consommateurs, des citadines et citadins vivant dans la pauvreté, des travailleuses et travailleurs agricoles, des productrices et producteurs alimentaires, ainsi que des femmes, des jeunes et des populations autochtones), qui reconnaissent la nécessité d’agir conjointement pour la réalisation du droit à l’alimentation et à la nutrition.
  • La Mission est dirigée par l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du catering, du tabac et des branches connexes (UITA), qui est membre du GNRtFN.
  • FIAN International, Pesticide Action Network, Right to Food Campaign (Népal), Right to Food and Social Security Campaign (Bangladesh) et Right to Food Campaign (Inde) participent également à la Mission. L’équipe est composée d’activistes, d’experts et de responsables syndicaux du Brésil, du Pérou, d’Allemagne, du Royaume Uni, de Moldavie, d’Espagne, du Bangladesh, du Népal et d’Inde.
  • Le rapport sera disponible début 2016.

Pour plus de renseignements sur la Mission, veuillez contacter : tang@fian.org

Pour toute information complémentaire, les représentants des médias peuvent s’adresser à delrey@fian.org